Italie 16

Darras tome 24 p. 144


   70. Il communiqua donc à Urbain II ces affligeantes nouvelles, lui représenta l'impossibilité personnelle où il se trouvait d'exer-

------------

1 Eadmer, Hist. Novor., 1..IV; Pat>\ lat., t. CLIX, col. 409-413.

=========================================

 

p145 CHAP.   I.  —   LE   COMTE  ROGER  LÉGAT  DU  SAINT-SIÈGE.                       

 

cer avec fruit sa charge pastorale, et faisant appel à toute la charité du pontife, le supplia avec larmes d'avoir pitié de lui et  d'accepter sa démission. « A ce mot, reprend Eadmer, le pape poussa une exclamation soudaine : 0 évêque! ô pasteur! s'écria-t—il, vous n'avez pas encore résisté jusqu'au sang, vous n'avez même  pas  reçu la moindre  blessure,  et vous voulez aban­donner la garde du troupeau que le Seigneur vous a confié! Le bienheureux Pierre poussa jusqu'à la mort la fidélité au Christ
son maître;  et Anselme, Anselme le saint,  le génie de notre âge, fuit le combat; il veut laisser ses brebis à la merci des loups!  Mais  que dirai-je donc, moi! Comment nous flatterions-nous d'aimer Jésus-Christ, si nous désertons les périls par lesquels il éprouve notre amour? Ah ! mon bien-aimé frère Anselme, loin, bien loin de vous de telles pensées! Jamais plus ne m'adressez une pareille requête. Non seulement je ne vous accorde point ce
que vous demandez, mais au nom du Dieu tout-puissant et par l'autorité du bienheureux Pierre prince des apôtres, je  vous ordonne en vertu de la sainte obéissance de conserver la charge primatiale  du royaume d'Angleterre. Si  la violence du  tyran aujourd'hui au pouvoir ne vous permet pas en ce moment d’y retourner, gardez du moins en face de la chrétienté tout entière votre titre d'archevêque, avec puissance de lier et de délier dans le pays même d'où l'on vous a banni. Partout où vous serez, portez vos insignes de primat de Cantorbéry. — 0 père, répondit humblement Anselme, je ne refuse point d'obéir; permettez-moi de vous exposer en quelques mots toute ma pensée. Votre excel­lence me croira, j'espère, si je lui dis que ma conscience me rend témoignage d'être prêt, avec la grâce de Dieu, à souffrir mille morts pour la défense des brebis  spirituelles de  Jésus-Christ. Mais on ne m'a point mis en face du martyre; on m'a simplement exilé. Sans parler du roi, ce sont les brebis elles-mêmes qui ont chassé leur pasteur. Les évêques qui ont fait entre mes mains ser­ment d'obéissance sont unanimes à  me conseiller d'abjurer la fidélité que je dois au bienheureux Pierre, pour conserver celle que, d'après eux, je devrais à un roi mortel. Comme je leur répon-
=========================================

 

p146 PONTIFICAT  DU   B.   URBAIN   II  (1088-1099).

 

dais   que  dans les conditions qui m'étaient faites, ne pouvant observer les deux termes du commandement évangélique : «Ren­dez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu 1, » je préférais encourir la disgrâce de César plutôt que de trahir les intérêts de Dieu; ils ne rougissaient pas de me dire que tel n'était point leur usage, qu'ils ne souffriraient pas qu'on fît injure au roi leur seigneur, que nul dans le royaume n'avait le droit d'agir sans son ordre ou sans sa permission. Maintenant, ô père, quel bien pourrais-je jamais faire avec de tels hommes? — Vous ferez pour le mieux suivant les circonstances, répondit le pape. Certes, ne croyez pas que je sois insensible aux outrages que vous avez subis, ni aux injustices dont vous êtes encore victime. Le glaive de saint Pierre ne demeurera pas inutile   entre mes  mains. Tenez-vous pour averti d'assister au prochain concile que j'ai indiqué pour les calendes d'octobre (1er octobre 1098) à Bari, dans la basilique du bienheureux Nicolas. Ne manquez pas de vous y trouver. Là, vous verrez  de vos yeux, vous entendrez de vos oreilles les mesures de justice et les censures dont seront frappés le roi d'An­gleterre et ses complices, ainsi que tous les princes qui lui res­semblent et se sont élevés contre la liberté de l'Église de Dieu. » Anselme se soumit, et prenant congé du pape, il revint à sa mo­deste solitude de Sclavia pour y attendre l'époque du concile 2. »

 

   71. Dans son récit, empreint d'un caractère  si touchant de piété filiale, Eadmer se préoccupait exclusivement de noter les faits relatifs à la biographie de son illustre archevêque. Il n'a point songé à nous dire quels étaient les princes qu'Urbain II visait dans cette parole : «Tous ceux qui ressemblent au roi d'Angleterre et se sont élevés contre la liberté de l'Église de Dieu, ac suis similibus qui contra libertatem Ecclesise Dei se erexerutl. » Cette omission du pieux moine est d'autant plus regrettable que son histoire est l'unique document qui nous fournisse quelques détails sur le concile de Bari, où Urbain II se proposait de lever le glaive de saint Pierre et de fulminer l'excommunication contre

-----------

1. Matth., xxn, 21.

2. Eadmer, Hist. Novor., col. 414.

========================================


p147  CHAP.  I.   —  LE   COMTE   ROGER   LÉGAT  DU   SAINT-SIÈGE.                        

 

les oppresseurs de l'Église. Sans nul doute, les princes auxquels  le bienheureux pontife faisait allusion étaient le pseudo-empe­reur Henri IV de Germanie et le roi Philippe I, qui imposait à la France le scandale de son adultère et à l'Église l'ignominie de ses  investitures simoniaques. Le gouvernement de l'univers catho­lique, au milieu de tant d'oppositions, de luttes, de persécutions et de violences, était un fardeau plus lourd à porter que celui dont saint Anselme eût voulu décliner la charge. On comprend qu'Urbain II ait pu répondre au pieux archevêque de Cantorbéry : «Et moi que dirai-je donc?» Ah ! quid dicam? La sollici­tude du bienheureux pontife embrassait à la fois l'Orient et l'Oc­cident. Elle suivait les armées de la croisade dans leur laborieuse expédition, entravée d'abord au nom  du  schisme germanique par le tyran de Hongrie Colomann,  puis au nom du schisme grec par la perfidie byzantine d'Alexis Comnène, enfin attaquée par toutes les puissances  musulmanes de  l'Asie. Pendant que l'épée de Godefroi de Bouillon ouvrait à force  de  victoires la route de Jérusalem, les schismatiques d'Occident se préparaient à fermer aux soldats de la croix le chemin du retour. Si l'insur­rection de Capoue eût triomphé, si l'étendard du pseudo-empe­reur allemand eût flotté sur les cités de l'Italie méridionale, c'en était fait des navires qui partaient chaque jour des ports de Bari et d'Otrante pour conduire des renforts aux croisés, et qui devaient les rapatrier eux-mêmes après la victoire. Les flottes   d'Alexis Comnène, auxiliaires du tyran de Germanie, fussent revenues dans les eaux de l'Adriatique; elles eussent repris, comme au temps de Robert Guiscard, le blocus de la Sicile. L'alliance entre les deux empereurs  de  Constantinople et d'Allemagne, cimentée par la haine également implacable que l'un et l'autre portaient à l'Église romaine, était de celles que la mort seule peut rompre. La Sicile, poste avancé qui semble destiné par la Providence à servir de point de jonction sur la Méditerranée entre l'Europe et le littoral de l'Afrique et de l'Asie 1, prenait dans ces graves conjonctures,

-------------------

1. Cf. t. XXIII de cette Histoire, p. 99.

========================================

 

p148         PONTIFICAT  DU   B.   URBAIN   II  (1088-1099).

 

une importance exceptionnelle. Sa conquête avait coûté sept années de sanglants combats. Roger, son vainqueur, avait dû triompher non-seulement des Sarrasins d'Afrique, qui l'occupaient depuis trois siècles, mais des armées que l'empire grec ne cessait d'envoyer à leur secours. Impuissante à reconquérir la Sicile pour son propre compte, la diplomatie byzantine préférait la voir sou­mise au joug musulman plutôt qu'à la domination d'un prince catholique. Les Sarrasins avaient su reconnaître la prédilection byzantine dont ils étaient l'objet, en permettant aux quelques églises épiscopales, encore subsistantes dans l'île, toute liberté de communiquer avec le patriarche de Constantinople, à la juridic­tion duquel elles demeurèrent soumises. Après la conquête, Roger se trouva en face d'un épiscopat grec, professant le schisme de Michel Cérulaire, et tenant ses pouvoirs du prétendu patriarche œcuménique de Byzance. La population chrétienne de Sicile n'avait point d'autres pasteurs; elle ne connaissait pas d'autre foi. Le reste des habitants se composait, nous l'avons vu, des familles musulmanes qui avaient accepté le nouveau pouvoir, et auxquelles Roger accorda le libre exercice de leur culte. Il fallait donc, outre la conquête par les armes, faire la conquête religieuse de l'île, l'arracher au schisme grec et la ramener au catholicisme. Telle fut la grande œuvre à laquelle Roger consacra les efforts de son génie, et tel était l'objet de la conférence qu'Urbain II se propo­sait d'avoir avec le héros.

 

   72. « En apprenant, dit Gaufred de Malaterra, que le comte comte Roger, prêt à s'embarquer pour la Sicile, venait d'arriver avec son neveu, le duc d'Apulie, au port de Salerne, le pape se hâta de venir le rejoindre. Tout le clergé et le peuple de Salerne se porta à la rencontre du pontife et des cardinaux, pour les escorter processionnellement à la basilique de Saint-Matthieu. Le lendemain entre le pape et le comte Roger eut lieu une conférence pleine de l'intimité la plus cordiale 1. » Le chroniqueur, qui nous fera bientôt connaître le résultat définitif de cet entretien, ne nous donne que fort peu de détails sur les sujets qui y furent traités, et

----------------

1. Gaufred. Malalerr., Histor, Sicul., 1. IV ; Patr. lat., t. CXLIX, col. 1209.

=========================================

 

p149 CHAP.   I.  — LE  COMTE  ROGER  LÉGAT DU  SAINT-SIÈGE.                        

 

dont la situation religieuse de la Sicile dut sans nul doute être le principal. Depuis qu'à Reggio, en 10891, des mesures préliminaires avaient été concertées entre Urbain II et le comte pour la réorga­nisation hiérarchique des églises de Sicile, quatre nouveaux sièges épiscopaux avaient été créés. « Roger avait réédifié la cathédrale d'Agrigente et un moine bénédictin, Gerland, était devenu évêque du nouveau diocèse, En même temps le comte appela à l'évêché de Mazara un clerc de Rouen, nommé Etienne. Un prêtre originaire de Provence, nommé Roger, fut promu au siège de Syracuse. Enfin Ànsgéric, moine breton, devint tout à la fois abbé et évêque du monastère et de l'église de Catane2. Pour former une pépinière de pieux ouvriers évangéliques, en un pays où le clergé indigène appartenait exclusivement au schisme grec, le comte restaura un grand nombre de monastères détruits ou abandonnés. Le plus célèbre entre tous, Sainte-Euphémie, fut placé sous la direction de Robert de Grandmesnil, ancien abbé de Saint-Evroul en Normandie, proscrit par une persécution locale. Les abbayes de la Trinité de Venosa et de Saint-Michel de Mélite en Calabre furent mises sous la juridiction du monastère de Sainte-Euphémie; aussi Ordéric Vital fait-il remarquer qu'on observait dans ces communautés italiennes le chant et les usages normands de Saint-Evroul d'Ouche 3. Diffé­rentes chartes reproduites par l'historien de Sicile Roch Pyrrhus, établissent que les monastères de Sainte-Marie de Mélite en Calabre, d'Itala ou Gitala près de Messine, et l'abbaye fameuse de Saint-Barthélémy dans les îles Lipari, furent à la même époque l'objet des libéralités de Roger, qui les exempta de toutes dîmes, redevances et servitudes4. » Ainsi, selon l'expression d'un chroniqueur con-

--------

1. Cf. t. XXIII de cette Histoire, p. 132.

2. Dans la cathédrale de Sainte-Agathe de Catane, ainsi qu'à Montréal et dans plusieurs autres églises de Sicile, les religieux bénédictins avaient une abbaye annexée à l'évêché. C'est ce qui explique comment l'abbé et l'évêque
pouvaient ne faire qu'une même personne. (Note de il/. A. de Brimont.)

3. In his itaque tribus monasteriis Italie, Uticensis cantus canitur, et monasticus ordo tisque hodie, prout opportunitas illius regionis et amor habitantium
permittit, obseroatur.
(Order. Vital., Hist. Ecoles., p. 11, 1. III, cap. xm ; Pair, lat., t. CLXXXYIII, col. 270.

4. M. A. de Brimont, Urbain II, p. 343-344.

========================================

 

p150 PONTIFICAT  DU  B.   URBAIN   (I  (1088-1099).

 

temporain, « le très-pieux comte se fit véritablement l'apôtre de la Sicile, construisant partout des églises qu'il dotait avec magnifi­cence, fondant des monastères pour le service divin et l'éducation de son peuple, méritant par ses bienfaits le surnom de protecteur des orphelins et de père des pauvres 1. »

 

73. « Or, reprend Gaufred de Malaterra, le seigneur aposto­lique Urbain II avait tout récemment, jamdudum, conféré à Robert, évêque de Traîna, le titre et les fonctions de légat de l'Église romaine en Sicile. Cette nomination s'était faite sans que le comte eût été préalablement consulté. Roger ne s'en montra point satisfait et le dit franchement au pape dans l'entrevue de Salerne 2. » Encore ici Gaufred ne nous donne point le motif de la répugnance du comte. On se rappelle qu'à une autre époque l'évêque de Traîna avait pris l'initiative de recommander à la cour de Roger le mariage projeté par le pape, de concert avec la comtesse Mathilde, entre la princesse sicilienne fille du comte, et le jeune roi d'Italie Conrad3. Son influence avait été prépondérante, et la royale union s'était accomplie sous ses aus­pices. Aucun nouvel incident n'était survenu qui fût de nature à altérer les bons rapports établis entre le comte et l'évêque de Traîna; du moins l'histoire n'en mentionne aucun. Il y a donc tout lieu de croire que ce ne fut ni une question d'étiquette, ni un mécontentement personnel qui porta Roger à réclamer contre la dignité prééminente à laquelle l'évêque venait d'être promu. S'il nous était permis de hasarder une conjecture, nous incline­rions à croire que la situation exceptionnelle de la Sicile fut l'unique motif et de la répugnance de Roger et du choix d'un nouveau légat apostolique qu'allait faire Urbain II. Le but princi­pal que se proposaient les deux augustes interlocuteurs était de détacher l'épiscopat indigène du schisme grec. Or, quelle autorité pouvait avoir sur des évêques qui prétendaient rester sous la

-----------------------

1.   Appendix ad Hist. Sic. Gaufred ; Pair lat., t. CXLIX, col. 1209.

2. Cf. t. XXIII de cette Histoire, p. 247.

3. Roger de Sicile avait sous sa domination la  Calabre ultérieure, à la pointe de l'Italie méridionale.

=========================================

 

p151 CHAP.   I.     -   LE  COMTE  ROGER  LÉGAT  DU  SAINT-SIÈGE.                                        

 

juridiction du patriarche de Constantinople, un évêque catho­lique, revêtu du titre et des pouvoirs de légat du saint-siége, titre et pouvoirs que les schismatiques ne reconnaissaient pas et auxquels ils ne voulaient point se soumettre. Si nous ne nous trom­pons, telle dut être la préoccupation simultanée de Roger et d'Urbain II. A la Sicile habitée mi-partie par des schismatiques grecs, mi-partie par des Sarrasins, il fallait un légat apostolique réunissant en sa main les deux pouvoirs spirituel et temporel. Ce que le pape Silvestre II de glorieuse mémoire avait fait pour le roi de Hongrie saint Etienne I, en l'instituant légat du saint-siége1, Urbain II allait le renouveler pour le comte Roger de Sicile.

 

   74. « Considérant, dit Gaufred de Malaterra, les éminents services rendus à la chrétienté par ce héros,  le  zèle  qu'il avait déployé pour les intérêts de l'Eglise et l'amour divin qui enflammait son cœur, le pape révoqua la nomination de Robert de Traîna,  et investit le comte lui-même du pouvoir héréditaire de légat apostolique dans toute l'étendue de la Sicile, avec la clause que tant que vivrait le comte et tant qu'il resterait de lui un descen­dant héritier du zèle paternel en faveur de l'Église , aucun autre légat ne serait envoyé en Sicile sans leur assentiment. Lorsqu'il serait besoin de faire exécuter les décrets de l'Église romaine, les exemplaires en devaient être transmis au prince, qui les ferait authentiquement recevoir et promulguer par les évêques de Sicile et de Calabre 2. Quand un concile serait indi­qué , le comte et ses futurs successeurs auraient le droit de désigner ceux des évêques de leurs états qui devraient s'y rendre; à moins qu'il ne fût question de traiter dans le concile une cause épiscopale concernant l'un des titulaires de ces pro­vinces, cause qui devra toujours être jugée hors de la Sicile et de la Calabre2.» Ces deux dernières stipulations visaient évidem-

-----------------

1. Cf. t. XX de cette Histoire, p. 368.

2. Voici le texte latin de Gaufred de Malaterra. Il importe d'en reproduire la teneur exacte pour établir la véritable portée du privilège concédé par Urbain II à Roger de Sicile : Cognoscens ipsum comitem in omnibus negotiu

=========================================

 

p152  PONTIFICAT  DU  B.   URBAIN   II   (1088-1099).

 

ment les évêques du rite grec, lesquels, sans l'autorité immédiate du comte ou de ses successeurs, eussent toujours refusé d'aller sur le continent assister à un concile indiqué par le pape, surtout si ce concile devait les mettre personnellement en cause. On remarquera d'ailleurs les conditions formellement exprimées par Urbain II relativement à la durée du privilège ainsi accordé au comte de Sicile, et à sa transmissibilité éventuelle. Le comte Roger en jouira sa vie durant, dum ipse comes advixerit; le privilège se perpétuera tant qu'il restera un héritier direct de Roger qui soit animé du zèle paternel pour le service de l'Église, vel aliuias haeredum suorum zeli paterni ecclesiastici exsecutor superstes fuerit. Ainsi d'une part, le privilège devait cesser de plein droit à l'ex­tinction de la descendance directe de Roger; d'autre part, même dans la lignée de ce comte, s'il survenait un prince indi­gne de son illustre ancêtre et ne professant point pour les inté­rêts de l'Église le zèle paternel, le privilège serait également-aboli.

 

   75. Telles furent les solennelles conventions arrêtées à Salerne entre le bienheureux pontife et le comte Roger de Sicile. Une bulle destinée à en perpétier le mémoire les porta à la connaissance de l'univers catholique. En voici la teneur : « Urbain évêque, serviteur des serviteurs de Dieu, à son très-cher fils Roger comte de Sicile et de Calabre, salut et bénédiction apostolique. — La majesté divine a exalté votre prudence en vous comblant de gloire et de triomphes. La loyauté de votre gouvernement a déjà

--------

ecclesiasticis exsequendis zelo divini ardoris exfervescere, cassato quod de-episcopo Trainensi fecerat, legationem bcati Pétri super comitem per totam Siciliam, vel habendam lueredilalUerpan.it, ea discretione ut, dum ipse cornes advixerit, vel aliquis lueredum suorum zeli paterni ecclcsiastici exsecutor superstes fuerit, legatus alius a Romana sede, ipsis invitis, nullus superponatur ; sed si qua Romans Ecclesise juris exsequenda fuerint, chartulis a Romana sede in Siciliam vel Calabriam directis, per ipsos concilia episcoporum earum-(lem provinciarum authentice definiantur. Quod si episcopi ad voncilium invi­tait fuerint, quot et quos ipsi comiti vel stds hssredibus vismn fuérit illuc dirigeait, nisi forte de aliquo ipsorum in consilio agendum sit, in prœsentia sua authentice definiri nequiverit. (Gaufred. Malaterr., 1. IV, cap. xxix, col. 1209.)

=========================================

 

p153  CHAP. I. — LE COMTE ROGER LÉGAT DU SAINT-SIÈGE.  

 

étendu les progrès de la sainte Église jusque dans les contrées habitées par les Sarrasins, et votre dévotion au siège aposto­lique s'est signalée en toute rencontre. Aussi nous vous avons adopté spécialement pour fils de la catholique Église. Plein de confiance dans la sincérité et la persévérance de votre dévoue­ment, nous confirmons par l'autorité de ces présentes lettres apostoliques le privilège que de vive voix nous avions promis de vous accorder ; savoir que, tout le temps de votre vie, et de celle de Simon votre fils ou d'un autre qui soit votre légitime héritier, nous n'établirons dans les terres de votre obéissance aucun légat de l'église Romaine sans votre assentiment ni contre votre gré. C'est à votre puissance et à votre sagesse que nous confierons, comme à notre légat, l'exécution des mesures dont sont chargés les légats ordinaires 1. Nous vous transmettrons direc­tement, ex latere nostro, pour les faire appliquer dans vos états, les décrets concernant les intérêts spirituels des églises saintes qui existent sous votre domination, pour la gloire du B. Pierre, pour l'exaltation du siège apostolique, auquel vous avez rendu jusqu'à ce jour une obéissance si dévouée et que vous avez secouru dans sa détresse avec tant de valeur et de fidélité. Lorsqu'un concile sera indiqué, je vous manderai d'y convoquer de ma part les évêques et abbés des églises et monastères situés dans vos états; mais vous choisirez vous-même ceux d'entre eux que vous voudrez y envoyer et en tel nombre que vous jugerez con­venable, retenant ceux qui vous paraîtront nécessaires pour le service et la sécurité de vos églises, ad servitium ecclestarum tua-rurn et ad tutelam retineas. Que le Dieu tout-puissant dirige toutes vos actions dans la voie de sa volonté sainte, et que, vous absol­vant de vos péchés, il vous conduise à l'éternelle vie. — Donné à

------------------

1. Voici le texte latin de cet important passage : Idcirco de tuœ probitatis sinceritate plurimum confidentes, sicut verbis promisimus, ita litterarum auc-toritate firmamus ; quod orani vitse tux tempore, vel filii lui Simonis, vel utterius qui legitimus tui liserés exstiterit, nulhtm in terra potestatis vestrse, prœter voluntatem mit consilium vestmm, legatum Romanes Ecclesise statuemzis. Quinimo gtue pev legatum actitri snmus, pet- vestram industriam legati vice cohiberi volurmts.

=========================================

 

p154         PONTIFICAT  DO   B.   URBAIN   II  (1088-1099).

 

Salerne par les mains de Jean, diacre de la sainte église Romaine, le III des nones de juillet, indiction VIIe, l'an onzième de notre

pontificat 1. »

© Robert Hivon 2014     twitter: @hivonphilo     skype: robert.hivon  Facebook et Google+: Robert Hivon