La communion de la foi 31

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  Liberté et modernité

 

   Il n'y a aucun doute sur le fait que l'époque que nous appelons « moderne » est dès son origine intimement liée au thème de la liberté: ---

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----. C'est sur ce terrain que Luther, avec De la liberté du chrétien, se place avec force. --------Il en allait de la liberté de conscience face à l'autorité ecclésiastique, c'est‑à‑dire de la liberté de l'homme la plus intérieure. Ce ne sont pas les ordres communautaires qui sauvent l'homme, mais sa foi toute personnelle au Christ. Que soudain tout le système des ordres de l'Église médiévale ne compte plus, voilà qui est apparu comme un formidable bond vers la liberté. --------- Le salut est libération, libération du joug des ordres supra individuels. ----------Dans le domaine politique, l'autorité temporelle s'est vue bien au contraire renforcée et affermie, avec la création des Églises d'État et des Églises locales. ------------

 

   La volonté d'émancipation, au sens du sapere aude de Kant ‑ ose faire usage de ta propre raison ‑, est un trait commun à toutes les Lumières. Il y va de l'émancipation de la raison individuelle des entraves de l'autorité, qui doivent toutes être soumises à la critique. Seul ce qui est clair pour la raison doit avoir cours. --------Je distinguerai deux grands courants: d'une part le courant anglo‑saxon, plus naturaliste, qui tend à la démocratie constitutionnelle

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comme seul système de liberté réaliste; de l'autre la tentative radicale de Rousseau, qui tend à la suppression totale du pouvoir. ------- Les ordres juridiques qui créent l'esclavage sont des ordres injustes. Depuis sa création, l'homme a des droits, qui doivent être mis en oeuvre pour que règne la justice. La liberté n'est pas conférée à l'homme de l'extérieur. Il a des droits parce qu'il a été créé libre. C'est sur la base de telles réflexions que les droits de l'homme sont devenus la Magna carta du mouvement de libération moderne. S'il est question ici de la nature, il ne s'agit pas d'un système biologique, mais plutôt de l'affirmation qu'avant tout ordre social l'homme lui‑même a des droits de par sa nature. ---------La nature porte en elle l'esprit, elle porte l'ethos et la valeur. Dans son principe, il s'agit ici absolument du concept de nature de Romains 2, inspiré par les stoïciens et transformé par une théologie de la création: les païens connaissent « par nature » la Loi et se tiennent donc à eux-mêmes lieu de Loi (Romains 2,14).

 

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---------- pour Rousseau, tout ce qui a été créé par la raison et la volonté se dresse contre la nature, la corrompt et la contredit. Le concept rousseauiste de nature est antimétaphysique, subordonné au rêve d'une liberté sans limites. Il en

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va de même chez Nietzsche, lorsqu'il oppose l'ivresse dionysiaque à l'ordre apollinien, et confirme ainsi les oppositions fondamentales de l'histoire des religions. Les régles de la raison, défendues par Apollon, corrompent l'ivresse libre et sans entraves de la nature. -------------- La Révolution française, qui avait commencé par l'idée de démocratie constitutionnelle, s'est vite débarrassée de ces liens pour adopter l'idée rousseauiste et anarchiste de la liberté; c'est précisément ainsi qu'elle est devenue ‑inévitablement ‑ une dictature sanglante.

 

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