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----- saint Augustin --------Dans une de ses premières oeuvres, le De musica,------ s'en tient encore entièrement à la théorie de la musique pythagoricienne. Pour Pythagore, le cosmos est une immense structure mathématique.1 Les Pythagoriciens assimilaient l'ordre mathématique du cosmos (cosmos signifiant «ordre») à l'essence du beau: la beauté naît d'un ordo intérieur qui, du fait qu'il est ordre, porte un sens. --------------
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-------- Pour les Anciens, seule une intelligence pouvait être à l'origine de phénomènes dotés d'un sens, tels ceux qu'ils observaient dans le cosmos---------Dès lors, percevoir la “musique cosmique”, c'était entendre le choeur des anges, un rapprochement d'ailleurs encouragé par la vision d'Isaïe (Is 6).
À cette personnalisation angélique des astres s'ajouta celle induite par la foi trinitaire dans le Père, le Logos et le Pneu- ma. On comprit que la mathématique du cosmos n'était pas un phénomène en soi ni le fait de divinités astrales. Son fondement était la Ratio créatrice, le Logos, en qui sont contenus les archétypes de l'ordre du monde, selon lesquels le Logos créateur, par l'action de l'Esprit, donne sa forme au monde matériel. ------- Le Logos est en effet le grand artiste en qui toutes les oeuvres d'art ‑ la beauté de l'univers ‑sont contenues dès les origines. Chanter à l'unisson avec l'univers signifie dès lors marcher sur les traces du Logos et se rapprocher de Lui. Tout art humain véritable est donc une participation à l'art de l'artiste par excellence: le Christ. ---------- une créativité purement subjective ne pourra jamais atteindre l'envergure du cosmos ni transmettre son message de beauté. La foi ne diminue donc pas la liberté de l'artiste, au contraire, elle élargit son horizon à l'infini.
La conception cosmique de la musique resta vivante, avec quelques variations, jusqu'à l'aube des temps modernes. Jugeant la métaphysique dépassée, le XIXe siècle l'écarta au profit d'une conception de la musique limitée à la seule expression du sujet et de la subjec-
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Aujourd'hui, les formes radicales du subjectivisme ont conduit à la dissolution du sujet, et les théories anarchiques de l'art achèvent leur oeuvre de déconstruction. Peut‑être cela nous aidera‑t‑il à dépasser cette surenchère de la subjectivité, cette inflation du moi, et à reconnaître de nouveau que seule la relation au Logos peut sauver le sujet, c'est‑à‑dire la personne, de son isolement, et lui faire retrouver sa juste place dans la communauté des hommes, dans une relation fondée en dernier ressort sur l'amour trinitaire.
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-------- Aujourd'hui encore, la joie de la foi en Dieu et l'expérience de sa présence dans la liturgie sont une source puissante et inépuisable d'inspiration. Les artistes chrétiens n'ont pas à se considérer à l'arrière‑garde culturelle: la liberté anarchique et vide qu'ils laissent derrière eux lasse d'elle‑même. Seule l'humble soumission au Logos dispense la vraie liberté et nous ouvre les véritables dimensions de notre vocation d'hommes.