Darras tome 42 p. 217
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§ VI. LA QUESTION DE L'INFAILLIBILITÉ ET LA CONSTITUTION Dei filius.
45. Cette agitation avant et pendant le Concile, imposait au Concile la question de l'infaillibilité, posée d'ailleurs depuis deux siècles par les gallicans et obligée à une solution par les attentats des jansénistes. La définition de l'infaillibilité devait être le grand événement du Concile. Les autres travaux avaient leur importance pour saper par la base ce rationalisme radical, qui mène logiquement au nihilisme. En déterminant mieux les droits du chef de l'Église et les prérogatives de son magistère, le Concile du Vatican ouvrait l'arène du grand combat entre les principes catholiques, représentés par Rome, centre de l'unité, et les idées modernes, ci-devant gallicanes, actuellement libérales, représentées par un certain nombre d'hommes qui n'étaient pas tous dépourvus de mérite. Ces hommes, sages selon le monde, inclinaient tous plus ou moins à une pensée de conciliation. Cette pensée, ils ne la formulaient pas dans l'acte positif d'un arrangement régulier; ils la bornaient plutôt à un maintien du statu quo dont la vague inertie eut sauvé suffisamment leurs illusions.
L'infaillibilité leur apparaissait donc comme un signe qu'il fallait contredire. Si elle était proclamée, la question moderne était près d'être finie, les idées libérales avaient un juge en dernier ressort, les condamnations du Syllabus acquéraient une grave importance, le libéralisme politique de France, le libéralisme scientifique d'Allemagne avaient le couteau sur la gorge. Par là se trouvaient atteints aussi dans leurs principes, les vieux restes du gallicanisme et les théories serviles de Fébronius. Dès lors, on comprend que les partisans de ces doctrines, surannées ou aventureuses, aient engagé cette lutte mémorable qui tient, à la lettre, le monde en suspens.
41. La première attaque vint du dehors, soutenue par une poignée de professeurs et d'écrivains qui niaient la vérité de la
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doctrine. A ce propos, on fit revivre tous les arguments de la vieille école en ajoutant même de nouveaux que n'eut pas avoués le génie de Bossuet, parce qu'ils renouvelaient en partie les idées de Richer et de Fobronius. Les gallicans ne tardèrent pas à se convaincre que la négation absolue de l'infaillibilité pontificale les mettait en contradiction non seulement avec la doctrine de presque tous les évêques et savants catholiques, mais avec leurs propres maximes ; car, d'après leurs propres maximes, la règle sûre en matière d'enseignement et de croyance est de se conformer à la foi et à l'enseignement du grand nombre des évêques et des théologiens. Cette position devait donc être, à bref délai, abandonnée, parce qu'elle était trop exposée aux projectiles et incapable de soutenir une défense.
47. Les adversaires prirent alors une seconde position ; la vérité fut admise, mais on niait qu'elle put être définie. Pour les débusquer de cette nouvelle position, il suffit de rappeler ce qui s'était passé à l'époque de la définition de la Conception Immaculée de Marie. Lors de cette définition, on avait soulevé la question des conditions à remplir pour savoir si une vérité est susceptible d'être solennellement définie. On trouve ces règles rapportées et exposées dans le Dictionnaire de la théologie catholique, traduit de l'allemand par l'abbé Goschler (t. XIV, p. 279). La docte commission, réunie sous la présidence du cardinal Ferrari, et composée de Mgr Caterini, du chanoine Audisio, des PP. Perrone, Passaglia, Schrader, jésuites, du P. Spada, dominicain, du P. Tonini, Conventuel, remplacé après sa mort par le P. Trullet, du même ordre, établit d'un commun accord les principes suivants :
1. Pour qu'une doctrine puisse être définie, il n'est pas nécessaire que les opinions n'aient jamais varié à son égard dans l'Église, que les fidèles et les maîtres de la foi aient toujours été d'accord.
2. Il n'est point nécessaire qu'on ne puisse alléguer aucun passage de l'Écriture en apparence contraire à cette doctrine.
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3. Il n'est point nécessaire qu'on puisse alléguer, en faveur de cette doctrine, des témoignages explicites ou implicites de l'Écriture sainte. Une doctrine peut être définie sur la tradition seule, sans le témoignage de l'Écriture.
4. Il n'est pas nécessaire, pour constater la tradition, qu'on produise une série non interrompue de témoignages des Pères, série qui remonterait aux apôtres pour descendre jusqu'à nous.
Après avoir établi ces règles négatives, la commission détermina les caractères positifs auxquels on reconnaît une doctrine susceptible d'être définie, savoir :
1. Que l'on produise quelques témoignages solennels, décisifs, qui renferment la doctrine à définir;
2. Que l'on puisse indiquer un ou plusieurs principes révélés qui renferment la doctrine à définir;
3. Qu'on ne puisse nier cette doctrine sans renverser un ou plusieurs articles de foi certains ;
4. L'accord actuel de l'épiscopat catholique;
5. La
pratique de l'Eglise.
La commission fut unanime au sujet de la possibilité et de l’opportunité de la définition.
48. Lorsqu'il fallut admettre la définibilité, on se rejeta sur la von-opportunité d'une définition. Par là on tuait la doctrine en paraissant la respecter. A Dieu ne plaise qu'on la conteste au fond ! On y croit même, assure-t-on, comme la majorité des écoles et la plupart des Eglises. Mais pourquoi la définir ? Que l'infaillibilité s'exerce comme elle l'a toujours fait, à la bonne heure; on sait qu'elle s'exerce en silence. L'affirmer hautement comme un dogme obligatoire, l'imposer surtout à la foi des peuples sous la sanction de l'anathème, c'est une chose que le besoin des temps ne réclame pas et que l'opinion publique ne saurait supporter. Telle était la thèse des inopportunistes ; on paraissait croire à l'infaillibilité ; mais, par égard pour elle et pour certaines âmes, infirmes dans la foi, on demandait au Concile de l'écarter. On dirait une inspiration de délicatesse, et, dans
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le fait, ce n'était qu'un piège insidieux. Si l'on se fut rangé à ce conseil, on n'eut pas manqué de dire que la question, en substance, était douteuse, et l'infaillibilité eut été ruinée sans espoir. Par une opération merveilleuse, on l'eut compromise en feignant de la sauver.
Prudence de serpent, mais pleine d'inconséquences. Les évêques, habitués à traiter avec les hérétiques et les infidèles, un Manning, un Léon Meurin, affirmaient, au contraire, que l'infaillibilité n'exciterait aucun ombrage, mais abrégerait plutôt le grand'œuvre des conversions. D'ailleurs ceux là même qui agitaient ce fantôme, ne pouvaient croire à ses épouvantements. A l'époque de la définition de la Conception Immaculée, dans les récents Conciles provinciaux de France et dans l'adresse au Pape pendant les fêtes du Centenaire, ils avaient tous fait profession de créance à l'infaillibilité. El maintenant que cette doctrine a régné quinze ou vingt ans, sans réclamations, sur la conscience du clergé et des fidèles ; maintenant qu'ils sont accoutumés à en porter le joug avec amour, vous voulez que ce joug leur devienne intolérable, parce que la définition d'un concile l'aura rendu plus auguste et plus sacrée ; s'il ne s'agissait d'un objet si vénérable, il ne faudrait voir là qu'une ridicule plaisanterie.
49. Après avoir créé le monstre de l'inopportunité, on s'efforça, en quatrième lieu, d'empêcher l'introduction de la question dans les délibérations du Concile. Mais, suivant la parole typique d'Antoine Cousseau, évêque d'Angoulème, ce que les libéraux avaient déclaré inopportun, ils l'avaient rendu nécessaire. La question fut tranchée dans les premiers jours de janvier, par un postulation demandant un décret formel, déclarant que l'autorité du pape est souveraine et exempte d'erreur, lorsqu'il prononce sur la foi et les mœurs, et qu'il enseigne ce qui doit être cru et tenu, rejeté et condamné par tous les fidèles. A l'appui de cette proposition, les signataires alléguaient les textes de l'Ecriture et la tradition universelle ; ils signalaient en particulier l'accord entre les Grecs et les Latins, à Lyon et à Florence.
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En présence des attaques dont elle était l'objet, ils réclamaient la plus solennelle affirmation de cette créance : « Si donc, concluaient-ils, le Concile du Vatican, aujourd'hui convoqué, gardait le silence et négligeait de rendre témoignage de la doctrine catholique, le peuple catholique se prendrait à douter de la vraie doctrine, les novateurs se vanteraient partout d'avoir réduit le Concile au silence par leurs arguments. En outre, ils abuseraient toujours de ce silence, même pour refuser d'obéir aux jugements et décrets du siège apostolique touchant la foi et la morale, sous prétexte que le Pontife de Rome a pu se tromper dans ces sortes de décisions.
« Le bien général de la chrétienté semble donc demander que le saint Concile du Vatican reprenne et explique davantage le décret de Florence sur le Pontife de Rome, et qu'il veuille bien affirmer en termes formels et qui excluent toute possibilité de douter, que l'autorité du Pontife de Rome est souveraine et par conséquent exempte d'erreur, lorsqu'il prononce sur les matières de la foi et des mœurs, et qu'il enseigne ce qui doit être cru et tenu, ce qui doit être rejeté et condamné par tous les fidèles de Jésus-Christ.
« Plusieurs sans doute ne manqueront pas de croire qu'il conviendrait de s'abstenir d'une définition de cette vérité catholique, pour ne pas éloigner davantage les schismatiques et les hérétiques de l'Église. Mais d'abord, le peuple catholique a le droit d'apprendre du Concile œcuménique ce qu'il doit croire sur un sujet aussi grave, et si mal à propos contesté dernièrement; sinon, l'erreur pernicieuse finirait par corrompre un grand nombre d'esprits simples et imprudents. C'est pourquoi, les Pères de Lyon et de Trente ont pensé qu'il fallait affirmer la saine doctrine, nonobstant le scandale des schismatiques et des hérétiques. Si ces hommes cherchent la vérité de bonne foi, loin d'être détournés, ils seront plutôt attirés, en voyant quel est le fondement principal de l'unité et de la solidité de l'Église.
« Pour ceux que la définition de la vraie doctrine par le Con-
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cile œcuménique détacherait de l'Église, peu nombreux, et déjà naufragés dans la foi, ils cherchent seulement un prétexte pour se débarrasser publiquement de l'Eglise, et montrent qu'ils l'ont déjà abandonnée dans leur for intérieur. Ce sont ces hommes qui n'ont pas craint d'agiter continuellement le peuple catholique, et le Concile du Vatican devra prémunir les fidèles enfants de l'Eglise contre leurs pièges. Quant au peuple catholique, toujours instruit et habitué à montrer une entière obéissance d'esprit et de parole aux décrets apostoliques du Pontife de Rome, il recevra la décision du Concile du Vatican sur sa suprême et infaillible autorité, avec un cœur joyeux et dévoué. »
50. Ce postulatum était appuyé de quarante-trois signatures, parmi lesquelles nous relevons les noms d'André Rœss, évêque de Strasbourg; Jean-Marie Doney, évêque de Montauban; Alexis Wicarl, évêque de Laval; Nicolas Sergent, évêque de Quimper; François Roullet de la Bouillerie, évêque de Carcassonne; Henri Plantier, évêque de Nîmes; Louis Delalle, évêque de Rodez; Armand Réné Maupoint, évêque de Saint-Denis de la Réunion et Charles Fillion, évêque du Mans. Cette demande réunit, en quelques jours, plus de cinq cents signatures. Il eut été facile d'en réunir davantage, et, il est regretable qu'en prévision des morts et des absences, on ne l'ait pas fait ; lorsqu'on eut atteint ce chiffre, on jugea que la requête pouvait paraître avec assez de majesté devant la députation chargée d'en apprécier la valeur. Du reste, on n'avait pas cru devoir provoquer l'adhésion des cardinaux ; on n'avait pas pu solliciter celle des membres de la commission des postulata, parce que la requête était à leur adresse; enfin un certain nombre des membres de la commission de fide, qui, en cas d'admission, auraient à délibérer sur le fond, n'avaient pu paraître engager davantage leur libre sentiment. Par ce postulatum, une grande majorité se prononçait pour l'opportunité et l'urgence d'une définition dogmatique.
D'autre part, une quarantaine d'évêques italiens présentèrent, pour le même objet, un postulatum où ils s'appuyaient spéciale-
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ment sur l'autorité de saint Thomas d'Aquin et de saint Alphonse de Liguori. Enfin un schéma anonyme, attribué à l'archevêque de Baltimore, moins accentué que les demandes précédentes, mais favorable encore à l'infaillibilité, proposait d'ajouter, au chapitre de Romano Pontifice, après avoir condamné les erreurs contraires à la primauté pontificale, d'ajouter :
1° Nous réprouvons absolument la témérité de ceux qui osent faire appel au Concile œcuménique des jugements suprêmes du Souverain Pontife.
2° Par suite, nous condamnons absolument les subtilités perverses de ceux qui osent prétendre qu'il n'est dû aux jugements du Pontife Romain qu'une soumission extérieure et non l'adhésion intérieure de l'esprit et du cœur.
3" En outre, nous condamnons absolument le langage et l'enseignement de ceux qui, dans l'hypothèse d'une dissension téméraire et déplacée entre l'universalité des Évêques et le Souverain Pontife, disputent sur la question de savoir qui est le plus grand du Pape ou de l'assemblée des Évêques, s'efforcent ainsi de séparer la tête du corps, Pierre de l'Église. Comme si l'assemblée de ses frères que Pierre, en la personne de ses successeurs, confirme, selon qu'il en a reçu l'ordre, pouvait jamais se séparer de Celui dont la foi, d'après la promesse de Jésus-Christ, ne faillira pas. Comme s'il était permis à ceux qui doivent être enseignés et confirmés par Pierre, d'enseigner et de confirmer contre lui-même.
« Nous jugeons qu'il faut repousser également l'opinion et la conduite de ceux qui, afin de pouvoir librement répandre dans la foule les erreurs condamnées par le Pontife romain, ne craignent pas de dire que le vrai sens des livres d'où sont extraites les propositions condamnées, n'a pas été bien compris par le Souverain Pontife. »
51. Il y eut un contre-postulatum attribué par la Gazette d'Augsbourg au cardinal Rauscher. Pour ce contre-postulatum ou pour un autre qui ne fut pas publié, on recueillit trente et une signatures d'évêques français, tous gallicans ou libéraux, dociles ou
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fidèles aux consignes des Matthieu et des Dupanloup. A la grande joie du Concile et de toute la Chrétienté, le Pape permit l'introduction de la cause devant l'assemblée conciliaire; un monitum du 6 mars 1870 en donna, aux Pères, l'avis officiel. Aussitôt que la question fut introduite, on tâcha, par des délais successifs, d'en rendre impossible la solution. Cette cinquième position perdue, on devait prolonger la discussion jusqu'à l'époque on les chaleurs forceraient le Concile à se séparer. Dans la septième position, la discussion étant close, on travaillera à faire remettre à plus tard, la définition. En huitième lieu, la définition étant rendue, on luttera pour en faire différer la promulgation. Neuvièmement, on affirmera que la définition, bien qu'elle ait été solennellement faite, confirmée et publiée par le Chef de l'Église dans le Concile œcuménique, et promulguée Urbi et Orbi conformément à l’usage traditionnel de l'Eglise, on affirmera, dis-je, que la définition ne liera pas la conscience des fidèles, tant que le Concile ne sera pas terminé et souscrit par les évêques(1).
52. Aussitôt que la question fut introduite, des passes d'armes s'engagèrent entre les feuilles catholiques et les feuilles libérales. L'objet de ces querelles, c'étaient les chances plus ou moins sérieuses d'une définition prochaine et les chiffres respectifs des signataires pour et contre. Les non-définitionnisles (on parlait alors ce beau langage) se flattaient de compter, dans leurs rangs, la moitié des évêques français, la presque unanimité des évêques allemands et austro-hongrois, la grande majorité des anglo-américains. En prenant ces chiffres pour exacts, on eut eu encore le droit de dire que les pays les plus civilisés, possédant les plus grands sièges, exerçant une puissante action intellectuelle, réclamaient, en majorité la définition. Mais c'étaient là de très petits arguments. L'argument des chiffres ne vaut rien ; l'argument des grandes nations, des nations éclairées, est absolument inacceptable. Les convenances et la justice le repoussent, la foi et les traditions le condamnent, l'histoire et le simple bon
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(l) Mgr Manning, Histoire du Concile œcuménique du Vatican, p. 47.
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sens suffisent à l'écarter. La France, l'Autriche et la Hongrie ne sont pas si hostiles qu'on le suppose ; l'Espagne, l'Italie, la Belgique, la Hollande, la Suisse, les deux Amériques contredisent toutes ces frivoles allégations. Cinq-cent-cinquante Pères ont signé les postulata, cent-vingt seulement ont signé le contre-postulatum. Pour prouver que cent-vingt l'emporte sur cinq-cent-cinquanle, il faut une bien singulière arithmétique.
53. Au milieu de ces passes d'armes, Pie IX réunissait à Rome une Exposition des Beaux-arts et de l'industrie appliquée au culte catholique. L'Exposition fut installée aux Thermes de Dioclétien, près de la gare du chemin de fer. Le Pape y fit figurer un grand nombre d'oeuvres appartenant au gouvernement pontifical, les basiliques romaines y envoyèrent les merveilles de leurs riches sacristies; la cathédrale d'Anagni produisit les présents de Boniface VIII. Le public admirait dans cette Exposition d'art religieux, des réductions des principales églises de Rome, des tableaux de peinture monumentale, les principales pièces de l'ameublement des églises; de nombreux échantillons de vitraux, de mosaïque et de marquetterie, des objets d'orfèvrerie, enfin tous les objets relatifs à la dévotion particulière et au culte public. Les principales maisons des pays catholiques avaient eu à cœur de se faire représenter dans cette exposition. La présence des évêques et d'un grand nombre de membres du clergé permettait les études faciles et les importantes comparaisons. Il est superflu d'ajouter que cette grande exhibition se dérobait aux reproches qu'une juste critique avait pu adresser à tant d'autres. A Paris, à Londres, à Vienne, on n'avait vu que les entassements du luxe et les raffinements corrupteurs de la civilisation. Ici les choses étaient faites avec le bon sens romain et les hautes inspirations de la piété. L'âme avait sa part, la grande part; ce qu'on voulait glorifier à Rome, ce n'était pas l'habileté de l'homme mis au service de sa bassesse, c'était son génie au service de Dieu.
Cette magnifique Exposition de l'art chrétien, si opportunément ouverte en même temps que le Concile du Vatican, fut close le
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31 mai; c'est le lundi, 16 mai, qu'eut lieu la proclamation des récompenses, dans la belle et vaste église de Sainte-Marie-des-Anges, aux Thermes de Dioclétien, et en présence de plus de deux cents évêques. Au discours adressé par le cardinal Bérardi, Pie IX répondit, fort à propos, en montrant l'alliance de l'art et de la science avec la religion, en repoussant d'un mot terrible les plus fortes objections élevées contre le Concile, et, par un ton magnifique, en rattachant toutes les œuvres de la vie présente aux grands intérêts de l'éternité. Combien un Pape, fidèle aux inspirations de la foi, dépasse en hauteur les plus grands génies de l'humanité.